Carnets de l'Economie

Pourquoi Tesla perd en réalité de l'argent ?




François Lapierre
23/04/2025

Paradoxe industriel ou choix stratégique assumé ? Les résultats du premier trimestre 2025 de Tesla révèlent une vérité peu évoquée par les communiqués du groupe : la division automobile, cœur d’activité historique de l’entreprise, est structurellement déficitaire hors crédits réglementaires.


Tesla : Une rentabilité nette en chute libre

Le 22 avril 2025, Tesla a publié des résultats trimestriels qui confirment un recul de son activité automobile. Les principaux indicateurs financiers montrent un effondrement des marges :
  • Revenu total T1 2025 : 19,34 milliards de dollars (–9 % sur un an)
  • Revenu automobile : 14,0 milliards de dollars (–20 % sur un an)
  • Bénéfice net : 409 millions de dollars (–71 %)
  • Marge opérationnelle : 2,1 % (vs 11,4 % un an plus tôt)
Mais ces chiffres masquent une réalité plus critique : sans les revenus issus des crédits carbone, Tesla serait en perte nette sur son cœur de métier.

Crédits carbone : un amortisseur toujours indispensable pour Tesla

Au premier trimestre, Tesla a engrangé 595 millions de dollars via la revente de crédits d’émission réglementaires à des concurrents qui ne respectent pas les normes CO₂. Ces crédits représentent donc plus de l'intégralité du bénéfice de l'entreprise. Sans ces transferts réglementaires — qui n'ont rien à voir avec l'activité industrielle elle-même — la marge brute du segment automobile serait tombée à 12,5 %, selon les données internes de Tesla. Cette marge est insuffisante pour couvrir les coûts fixes élevés, liés notamment :
  • à la maintenance de quatre usines internationales (Fremont, Shanghai, Berlin, Austin) ;
  • à la montée en puissance des projets Robotaxi et IA ;
  • aux remises commerciales accrues pratiquées pour stimuler la demande ;
  • à l’augmentation des coûts logistiques et d’approvisionnement, liée aux politiques tarifaires de l’administration Trump.

Une baisse des prix qui pèse lourdement

Depuis fin 2023, Tesla a engagé une stratégie agressive de baisses de prix, en réponse à la pression concurrentielle exercée par BYD (Chine), Hyundai, et plusieurs start-up du secteur EV. Cette stratégie a permis de soutenir les volumes… mais au prix d’une érosion massive de la marge unitaire.
Selon CNBC, le revenu moyen par véhicule est tombé en dessous de 41 000 dollars, soit une baisse de 12 % sur un an. Or, Tesla est une entreprise historiquement positionnée sur le segment premium. Le décalage entre l’image de marque et le pricing accentue la pression sur la rentabilité.
En parallèle, plusieurs facteurs internes aggravent les pertes de marge :
  • Dépenses R&D en augmentation, notamment pour l’IA embarquée et la conduite autonome.
  • Investissements dans la chaîne robotaxi (Cybercab), sans retour immédiat.
  • Retards de lancement sur les nouveaux modèles, ce qui prolonge l’obsolescence technique des gammes existantes.
  • Dépendance aux fournisseurs asiatiques pour les composants stratégiques (batteries, puces, électronique de puissance), exposant Tesla à la volatilité des prix mondiaux.
Tesla conserve, à ce jour, une trésorerie brute supérieure à 19 milliards de dollars, notamment grâce à ses marges passées, aux ventes d’actions régulières, et à ses revenus annexes (stock-options, énergie, IA). Mais cette solidité ne masque plus la baisse continue du free cash-flow opérationnel, qui s’est contracté de 38 % sur un an, selon les dernières données du rapport aux investisseurs. Si la tendance se poursuit, Tesla pourrait être contrainte de ralentir ses programmes de croissance non rentables, notamment les projets d’expansion dans l’IA et le stockage énergétique.










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