Carnets de l'Economie

« Clause Molière » : le gouvernement interdit aux préfets de l’appliquer




Anton Kunin
04/05/2017

Une instruction interministérielle, signée par quatre ministres, interdit aux préfets de rendre l’usage du français obligatoire sur les chantiers.


La « clause Molière » est source de discriminations et non pas de davantage de sécurité

Après l’adoption par toute une série de villes et de régions de « clauses Molière » interdisant l’embauche dans le BTP de salariés ne maîtrisant pas le français, Myriam El Khomri (la Ministre du Travail), Michel Sapin (Économie), Matthias Fekl (Intérieur) et Jean-Michel Baylet (Aménagement du territoire) ont fait savoir formellement que de telles pratiques étaient contraires à la loi. Les ministres estiment que cette mesure est de nature à créer des « discriminations directes ou indirectes à l'égard des opérateurs économiques et des travailleurs d'autres Etats membres », et que le fait de parler français n’induit pas nécessairement une meilleure sécurité sur les chantiers.

Les ministres rappellent également que la réglementation en vigueur doit être affichée sur le lieu de travail. Si des salariés de nationalité étrangère sont présents, elle doit être traduite dans la langue nationale de leur pays.

Cette réponse interministérielle était en préparation dès le 21 mars 2017, comme le révélait à l’époque Batiactu.

Que disent les « pro-clause Molière » ?

À ce jour, des « clauses Molière » s’appliquent dans toute une série de régions, de départements et de communes pour les chantiers relevant de la commande publique. C’est le cas des régions comme les Pays de la Loire, les Hauts-de-France, la Normandie, l'Auvergne-Rhône-Alpes et l'Ile-de-France, de départements comme le Haut-Rhin, la Vendée, le Nord, les Alpes-Maritimes, la Corrèze et la Charente, et de villes comme Vienne (Isère), Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire), Bourges (Cher), ou encore Montfermeil (Seine-Saint-Denis).

Éric Ciotti, président du Conseil départemental des Alpes-Maritime, défend sur son site Internet sa décision d’appliquer une « clause Molière » dans son département en invoquant la nécessité pour les salariés de maîtriser le français pour comprendre les consignes de sécurité données. Il estime également que cette clause est à même de « limiter les distorsions de concurrence dont souffrent les entreprises françaises écartées de la sous-traitance au profit de sociétés étrangères pour des motifs de coûts ».

Pour sa part, dans un entretien à Batiweb, Jacques Chanut, Président de la Fédération française du bâtiment, justifie son soutien à la « clause Molière » par la supposition comme quoi les travailleurs détachés venant en France n’auraient pas le projet d’apprendre le français de toute façon. « La durée moyenne d’un détachement, c’est 51 jours. Forcément, il n’y a pas vraiment de volonté d’apprendre les rudiments d’une langue lorsqu’on reste aussi peu de temps ! », a-t-il déclaré à cette publication.










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