Carnets de l'Economie

Amazon a trouvé une parade pour continuer à livrer des livres gratuitement




Anton Kunin
06/11/2024

Face aux restrictions découlant de la loi Darcos, Amazon annonce la mise en place d’un retrait gratuit de livres en casiers automatiques, relançant ainsi le débat sur l’équité entre librairies et l’e-commerce.


Livraison gratuite de livres : les casiers automatisés à la rescousse

En principe, les livres commandés sur Internet ne devraient pas être livrés gratuitement. En effet, depuis le 1er octobre 2023, la loi Darcos impose des frais minimum de 3 euros pour la livraison de livres pour toute commande en dessous de 35 euros. Cette législation vise à protéger les librairies indépendantes contre la concurrence des géants de l’e-commerce comme Amazon.
Cependant, le géant américain a trouvé une manière ingénieuse de contourner cette contrainte légale en offrant la possibilité de retirer les commandes gratuitement dans un réseau de casiers automatisés. Amazon affirme que cette solution est conforme aux exigences de la loi, tout en exploitant une faille qui permet la gratuité si le livre est récupéré dans un commerce de vente au détail de livres. Ces casiers, souvent installés dans des supermarchés vendant aussi des livres, permettent donc au géant de maintenir une option de livraison sans frais, ce qui suscite une vive controverse.

Cette stratégie d’Amazon, qualifiée de « hack » par certains observateurs, repose sur l’interprétation d’une disposition spécifique de la loi. Celle-ci stipule que la livraison gratuite n’est possible que si le retrait se fait dans un commerce de livres. En plaçant ses casiers dans des supermarchés possédant une section dédiée aux livres, Amazon estime répondre aux critères exigés. Par ailleurs, l’entreprise soutient que cette option est particulièrement bénéfique pour les habitants des zones rurales ou des petites villes, où l’accès aux librairies indépendantes est souvent limité. Néanmoins, cette initiative est perçue par certains comme une manœuvre commerciale habile visant à préserver son avantage concurrentiel tout en contournant l’esprit de la loi, une pratique qui irrite les libraires indépendants et leurs soutiens.

Pour les libraires, Amazon tente de se soustraire à la réglementation

En parallèle de cette initiative, Amazon conteste activement la loi Darcos devant le Conseil d’État, qui a sollicité un avis de la Cour de justice de l’Union européenne. Le géant de la vente en ligne argue que cette législation limite les droits des consommateurs et impacte leur pouvoir d’achat, une affirmation renforcée par des sondages commandés par l’entreprise. En effet, une enquête de l’IFOP a révélé que 62% des sondés estiment que le frais de livraison de 3 euros compromet leur budget, une opinion qui renforce la stratégie de communication d’Amazon. Cette campagne publique cherche non seulement à sensibiliser les consommateurs, mais aussi à faire pression sur les instances législatives et les décideurs.

Cependant, la mise en place de ces casiers automatiques, situés parfois dans des centres-villes à proximité immédiate des librairies, est interprétée par les libraires et leurs soutiens comme une tentative délibérée d’Amazon de se soustraire à la réglementation. Cette situation reflète une opposition croissante entre les modèles de distribution numérique et les commerces physiques, où chaque acteur tente de préserver ses parts de marché. La bataille que mène Amazon, à la fois sur le plan judiciaire et dans l’opinion publique, illustre les défis posés par la régulation du commerce en ligne face à des géants capables de mobiliser d’importants moyens pour influencer la loi en leur faveur.


Tags : amazon








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