Un déficit plus important que prévu pour les retraites à l'horizon 2030



Aurélien Delacroix
12/06/2024

Le Conseil d’orientation des retraites annonce un déficit du système de retraite de -0,4 % du PIB d’ici 2030, une prévision révisée à la hausse par rapport à l’année dernière. Ce rapport, marqué par des hypothèses économiques plus prudentes, dévoile une situation financière préoccupante malgré les réformes récentes.


Des prévisions dégradées pour le système de retraite

Le Conseil d’orientation des retraites (COR) publiera cette semaine son rapport annuel qui apportera des nouvelles peu encourageantes quant à l’état financier futur du système de retraite français. Selon le rapport, le déficit prévu pour 2030 s’élève désormais à -0,4 % du produit intérieur brut (PIB), contre -0,2 % anticipé l’an dernier après l’adoption de la réforme des retraites. Cette révision à la hausse du déficit s’explique notamment par une dégradation des prévisions macroéconomiques du gouvernement et une revalorisation plus importante que prévue des retraites complémentaires Agirc-Arrco en novembre 2023.

Les dépenses de retraite, principal indicateur financier dans les comparaisons internationales, augmentent également légèrement : elles représentent 13,7 % du PIB en 2030, contre 13,5 % selon le rapport de l’an dernier. À plus long terme, ces dépenses atteindront 13,2 % du PIB en 2070, contre 13 % précédemment estimé. Le déficit pour l’année 2024 est quant à lui prévu à -0,2 % du PIB, après un excédent de +0,1 % enregistré l’année précédente.

L’édition 2024 du rapport du COR est la première dirigée par Gilbert Cette, qui a succédé à Pierre-Louis Bras en novembre 2023. Ce changement de présidence intervient dans un contexte de tensions avec le gouvernement, qui avait reproché au COR de minimiser les déficits futurs avant la réforme et de les exagérer par la suite. 

Sous la direction de M. Cette, le COR adopte désormais des hypothèses de croissance de la productivité du travail plus prudentes, avec quatre scénarios allant de +0,4 % à +1,3 %, contre +0,7 % à +1,6 % précédemment. Le rapport se focalise principalement sur un scénario de référence à +1 %, les autres hypothèses étant examinées dans le cadre d’études de sensibilité moins détaillées.

Un contexte social et économique complexe

Cette nouvelle méthodologie a suscité des critiques, notamment de la part des syndicats, qui y voient une préparation implicite à de nouveaux efforts de financement. En effet, les prévisions du COR montrent qu’aucun retour à l’équilibre n’est prévu pour les 45 prochaines années, malgré la récente réforme qui a repoussé l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans.

Les révisions à la hausse du déficit sont également attribuées à des revalorisations des pensions de base et complémentaires plus élevées que prévu. En novembre 2023, les retraites complémentaires Agirc-Arrco ont été revalorisées de 4,9 %, contre une prévision de 3,8 %, et les retraites de base ont bénéficié d’une augmentation de 5,3 % au 1er janvier 2024. Ces ajustements, non anticipés dans le rapport précédent, alourdissent les dépenses et compliquent l’objectif gouvernemental de ramener le système de retraite à l’équilibre d’ici 2030.

Au-delà de 2030, les projections financières restent préoccupantes. Selon le scénario de référence du COR, le déficit du système de retraite se maintiendra à 0,8 % du PIB jusqu’en 2070. Ce chiffre, bien que significatif, est surtout remarquable par la nouvelle approche méthodologique qui le sous-tend, reflétant un changement stratégique impulsé par le nouveau président Gilbert Cette.

Le rapport annuel du COR met en lumière les défis persistants du système de retraite français, soulignant la nécessité de réévaluer les politiques économiques et sociales pour assurer sa viabilité à long terme. Les récentes réformes et les ajustements de prévisions économiques démontrent que le chemin vers l’équilibre financier reste semé d’embûches, appelant à une vigilance accrue et à des stratégies adaptées pour les années à venir.