Inflation : Christine Lagarde met en garde les entreprises



Axelle Ker
10/10/2023

Dans un entretien accordé à La Tribune du Dimanche, la présidente de la Banque centrale européenne (BCE), Christine Lagarde, a fait part des recommandations de la BCE au sujet de la prise en charge des hausses de salaire par les entreprises.


Augmenter les salaires pour appuyer la décélération de l'inflation

« Les perspectives économiques à court terme de la zone euro se sont détériorées en raison principalement de l'affaiblissement de la demande intérieure, du niveau élevé de l'inflation et du durcissement des conditions de financement qui freinent les dépenses », indiquait le bulletin économique de la BCE n°5/2023, publié le 10 août de cette année-là. Face au ralentissement du marché intérieur de la zone euro, la présidente de la BCE, Christine Lagarde s'est exprimée lors de son entretien accordé à La Tribune du Dimanche, dimanche 8 octobre 2023, sur la nécessité de stabiliser l'économie de la zone euro et le rôle des entreprises dans cet objectif  : « Les entreprises ont intérêt à prendre sur leurs marges une partie des hausses de salaires ».

La présidente de la BCE, pour appuyer son propos, ajoute  : « L'inflation décroît. Elle est même en décélération constante. C'est une bonne nouvelle. » : pouvoir d'achat - croissance - déflation, c'est le cercle vertueux sur lequel mise l'institution européenne. En effet, si l'on suit les prévisions de la Banque centrale européenne, à condition que les entreprises « jouent le jeu », l'inflation devrait chuter à 5,6 % dans la zone euro d'ici la fin de l'année (contre 8,4 % en 2022), pour atteindre les 3,2 % en 2024 et les 2 % d'ici 2025. Pour la présidente de la BCE, les entreprises ont finalement tout intérêt à prendre en charge une partie de la hausse des salaires puisqu'elles en tireront bénéfice après coûts : « les entreprises se comporteront de la même façon que lors de crises précédentes, c'est-à-dire en réduisant un peu leurs marges pour intégrer une partie des hausses de salaires » Malheureusement, si certaines entreprises peuvent réduire leur marge, toutes ne seront pas en capacité de le faire, encore moins ad vitam æternam : le nombre de faillites d'entreprises au cours du deuxième trimestre 2023 a augmenté de 35 %  en France.


Les perspectives économiques restent incertaines

Toutefois, Christine Lagarde souligne un autre élément préoccupant et qui échappe à tout contrôle de la zone euro : le contexte international. Pour la présidente de la BCE, « il faut s'habituer à l'idée que le prix du pétrole restera élevé. Ce qui doit nous inciter encore plus à poursuivre la lutte contre le changement climatique et à évoluer vers un mix énergétique moins dépendant des énergies fossiles et de fournisseurs extérieurs ». 

En effet, la plupart des pays membres de la zone euro se sont déjà habitués à voir le prix du carburant à la pompe atteindre les 2 euros le litre, voire plus. Cela est en grande partie dû aux pays producteurs, l'Arabie saoudite en particulier, qui n'hésitent pas à faire usage de la politique de robinet pour accroître leurs marges. Néanmoins, l'attaque du Hamas contre Israël, survenue le samedi 7 octobre 2023, vient rebattre l'ensemble des cartes géopolitiques et pourrait avoir un impact sans précédent sur les prix de l'énergie. Certains pays producteurs, avec l'Iran en tête, pourraient envisager, comme ils l'avaient fait lors de la guerre du Kippour en 1973, de limiter drastiquement leurs exportations de pétrole vers les pays occidentaux et d'augmenter le prix du baril brut (+ 70 % lors du second choc pétrolier de 1973).